La loi qui transpose l’accord national interprofessionnel (ANI) conclu le 10 décembre 2020 par les partenaires sociaux en vue de réformer la santé au travail a été promulguée le 2 août dernier. Elle doit être appliquée d’ici le 31 mars 2022.
Le présent article vous en présente les grandes lignes et le calendrier.
- Un passeport prévention.
Le passeport reprendra toutes les formations suivies par un travailleur sur la santé et la sécurité.
Sur amendements des parlementaires, le passeport de prévention sera intégré dans le passeport d’orientation, de formation et de compétences si le salarié ou demandeur d’emploi en possède un.
- Un DUER dématérialisé.
Le document unique d’évaluation des risques (DUER) devra désormais être conservé par l’employeur dans ses versions successives, pendant une durée d’au moins 40 ans pour permettre la traçabilité collective des expositions aux risques.
Il sera à déposer, de façon dématérialisée, sur un portail numérique.
Le DUER devra être à la disposition des travailleurs, des anciens travailleurs ainsi que de toute personne ou instance pouvant justifier d’un intérêt à y avoir accès.
Le texte initial imposait à toutes les entreprises d’élaborer un programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail (PAPRIPACT), compris dans le DUERP. Le Sénat a supprimé cette obligation pour les TPE et PME de moins de 50 salariés.
- Des SPST aux missions plus étendues.
Les SST (services de santé au travail) deviennent les SPST (services de prévention et de santé au travail).
Les SPST auront des missions plus étendues, notamment la charge de l’évaluation et de la prévention des risques professionnels, des actions de promotion de la santé sur le lieu de travail, des campagnes de vaccination et de dépistage ou encore un rôle de conseil, en matière de conditions de télétravail par exemple.
- Le harcèlement sexuel au travail redéfini.
Le texte initial alignait le code du travail sur le code pénal. Les parlementaires sont revenus sur cette définition en prévoyant que le harcèlement sexuel au travail est matérialisé lorsqu’il est subi par le salarié et non pas lorsqu’il est imposé par l’auteur ou les auteurs.
- Une visite de mi- carrière professionnelle pour lutter contre la désinsertion.
Une visite de mi- carrière professionnelle (à 45 ans à défaut d’accord de branche) et un rendez-vous "de liaison" (en vue du retour du salarié après une absence prolongée) seront à mettre en place.
Les SPST devront mettre en place une cellule dédiée à la prévention de la désinsertion professionnelle. Les médecins du travail pourront recourir à la télémédecine.
- Une nouvelle gouvernance de la santé au travail.
La loi adapte l’organisation interne des SPST en élargissant les conditions dans lesquelles le médecin du travail peut déléguer une partie de ses missions à d’autres membres de l’équipe de santé et en renforçant le pilotage national.
Par exemple, les médecins de ville pourront contribuer au suivi médical des travailleurs et le statut d’infirmier en santé au travail est consacré au niveau de la loi.
Les sénateurs ont prévu aussi une expérimentation dans trois régions volontaires permettant à des médecins de travail de prescrire des arrêts des travail et des soins liés à la prévention au travail.
Afin d’assurer un meilleur suivi des travailleurs, l’accès au dossier médical partagé (DMP) sera ouvert au médecin du travail qui pourra l’alimenter.
Les sénateurs sont revenus sur le principe que l’intégralité du dossier médical en santé au travail (DMST) soit intégrée au DMP. À la place, un volet relatif à la santé au travail complétera le DMP. Il sera accessible aux médecins et professionnels de santé du patient.
Les mesures du texte doivent s’appliquer au plus tard le 31 mars 2022.
Des dates butoirs ont été fixées par le Sénat, notamment :
- au 1er octobre 2022 pour le passeport prévention
- au 1er janvier 2023 pour le médecin praticien correspondant
- au 1er janvier 2024 pour le volet relatif à la santé au travail du DMP.
Le texte tend à améliorer la qualité du service rendu par les services de santé au travail. Ces derniers devront offrir un socle de services et feront l’objet d’une procédure de certification et d’agrément. Leurs règles de tarification sont revues. Un amendement sénatorial encadre davantage la fixation du niveau des cotisations de l’offre socle de services. Un décret doit intervenir.
Le suivi en santé au travail est étendu aux intérimaires, aux salariés des entreprises sous-traitantes ou prestataires comme aux travailleurs indépendants. Des amendements parlementaires sont venus compléter ce volet notamment sur les conditions de mise en œuvre du suivi de la santé des salariés du particulier employeur, principe de mutualisation du suivi de la santé de travailleurs occupant des emplois identiques en cas de pluralité d’employeurs, dispositifs d’accompagnement permettant de tester un nouveau poste de travail élargis au contrat de rééducation professionnelle en entreprise (CRPE) et à l’essai encadré (destiné aux assurés en arrêt de travail).
S’agissant du pilotage national, un comité national de prévention et de santé au travail (CNPST), aux compétences étendues, est institué au sein du Conseil d’orientation des conditions de travail.
Un dernier article, issu de la commission mixte paritaire, prévoit les conditions de la fusion des agences régionales pour l’amélioration des conditions de travail (ARACT) avec l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT). Un décret doit intervenir avant 2023.
Pour en savoir plus : le texte en intégralité de la loi n°2021-1018 du 2 août 2021