Le rapport établi par Madame Myriam El Khomri, a été remis à Madame Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, le 29 octobre 2019.
Ce rapport présente le plan de mobilisation nationale qui vise à répondre au manque actuel d’attractivité de ces métiers et aux forts besoins de recrutements à venir.
Le rapport présente dans un premier temps les principaux constats avec quelques chiffres-clés :
Pour répondre au vieillissement démographique et améliorer les conditions de prise en charge de ces personnes, près de 93 000 postes supplémentaires devront être créés dans les 5 prochaines années (2020-2024).
Ces métiers peuvent être mal rémunérés, en particulier au domicile, avec un démarrage au SMIC, voire en-dessous, des progressions salariales et de façon générale des perspectives d’évolution qui sont très faibles. En conséquence, un taux de pauvreté élevé parmi ces métiers, par exemple 17,5% de ménages pauvres parmi les intervenants à domicile contre 6,5% en moyenne pour l’ensemble des salariés.
Les conditions d’exercice de ces métiers sont très difficiles notamment par manque d’effectif. Les postures, les rythmes de travail sont marqués par une forte pénibilité et se traduisent par un nombre d’accidents du travail et de maladies professionnelles (« sinistralité ») trois fois supérieur à la moyenne nationale.
Le plan présente ensuite les 59 mesures à prendre autour de 5 grands axes, et les côuts des principales orientations.
Principales mesures :
Axe 1 : Assurer de meilleures conditions d’emploi et de rémunération
- Ouvrir 18 500 postes supplémentaires par an d’ici à fin 2024
Explication : Des ouvertures de postes seront nécessaires dans les toutes prochaines années pour répondre aux besoins de prise en charge du grand âge, dans un contexte de vieillissement démographique d’une part et de nécessaire augmentation du taux d’encadrement et du renforcement des temps collectifs d’autre part.
- Remettre à niveau au plus tard au 1er janvier 2021 les rémunérations inférieures au SMIC dans les grilles des conventions collectives à domicile
Explication : Aujourd’hui, les rémunérations des métiers du grand âge sont inférieures au SMIC dans certaines conventions collectives, ce qui a pour conséquence que les professionnels restent payés au SMIC pendant une dizaine d’années. Il convient donc de remettre ces rémunérations à niveau sans délai.
- Négocier une offre nationale compétitive pour équiper les accompagnants à domicile de véhicules propres
Explication : Les accompagnants à domicile supportent, notamment en zone rurale, des frais importants pour la mobilité d’un domicile à l’autre. Or, ces frais sont souvent insuffisamment indemnisés.
Axe 2 : Donner une priorité forte à la réduction de la sinistralité et à l’amélioration de la qualité de vie au travail
- Porter dans le cadre de la branche AT-MP de l’assurance-maladie un programme national de lutte contre la sinistralité, ciblé sur ces métiers
Explication : Le taux d’accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP) est aujourd’hui tellement élevé dans le secteur du grand âge qu’un programme national spécifique apparait de plus en plus nécessaire.
- Imposer 4h de temps collectifs par mois d’équipe à domicile et en EHPAD
Explication : Les temps collectifs entre professionnels (groupes de parole, échanges de bonnes pratiques, etc.) sont indispensables pour garantir la qualité de la prise en charge des personnes âgées et pour donner du sens au travail des professionnels.
Axe 3 : Moderniser les formations et changer l’image des métiers
- Supprimer le concours d’aide-soignant pour la formation initiale et l’apprentissage et assurer l’inscription dans les centres de formation via Parcours sup pour la formation initiale
Explication : Face à la pénurie récente de candidats, il convient de revoir en profondeur et d’ouvrir plus largement les conditions d’accès à ces formations.
- Garantir systématiquement la gratuité de la formation, hors frais d’inscription, quelle que soit la situation du candidat
Explications : Aujourd’hui, 5% environ des personnes en formation doivent payer leur formation, en sus des frais d’inscription, ce qui constitue une inégalité à laquelle il convient de mettre fin.
- Réduire drastiquement l’éventail des diplômes reconnus dans le champ de l’accompagnement des personnes en perte d’autonomie
Explications : Il existe aujourd’hui une soixantaine de diplômes conduisant aux métiers d’accompagnant des personnes fragiles. Ce foisonnement nuit gravement à la visibilité et à l’attractivité des métiers du grand âge.
- Porter à 10 % la part des diplômes d’aide-soignant et d’accompagnant éducatif et social obtenus par la voie de l’alternance
Explications : Très peu développé pour ces diplômes, l’apprentissage est une voie efficace pour former rapidement et efficacement des professionnels à fort potentiel d’insertion dans le marché de l’emploi. Pour 100.000 personnes formées par an cela représentait 10.000 alternants (contre 600 par aujourd’hui).
- Porter à 25% la part des diplômes délivrés chaque année dans le cadre de la VAE en privilégiant la VAE collective
Explications : Les processus de validation des acquis de l’expérience (VAE) permettent d’augmenter rapidement e nombre de professionnels et donc de répondre aux besoins de recrutement des structures. Pour 100.000 personnes formées par an, cela représentait 25000 personnes.
- Permettre à tous les professionnels exerçant auprès des personnes en perte d’autonomie d’accéder à une formation spécifique en gérontologie
Explications : Une formation d’assistant de soins en gérontologie (ASG, 140 heures) existe depuis le premier plan cancer, mais aussi un passeport gériatrique inscrit à l’inventaire depuis 2017 ; il s’agit d’en ouvrir l’accès à tous les professionnels qui assistent quotidiennement les personnes en perte d’autonomie.
- Lancer une campagne nationale de communication pour changer le regard de la société sur les personnes âgées et les métiers du grand âge
Explications : Une grande campagne de communication sur les métiers du grand âge, aujourd’hui méconnus et dévalorisés, permettrait de changer le regard porté sur eux et donc de susciter des vocations.
Axe 4 : Innover pour transformer les organisations
- Soutenir et évaluer les démarches innovantes dans le champ de l’organisation du travail
Explications : Ces démarches innovantes concernent par exemple, le modèle des équipes autonomes inspiré de la méthode Burtzoorg, le label Humanitude fondé sur une nouvelle approche de la relation des professionnels avec les personnes en perte d’autonomie, ou le label Cap Handéo adossé à une démarche de certification
qualité.
- Reconnaître l’intérêt de la pratique avancée en gérontologie et soutenir son développement
Explications : La pratique avancée permet à des infirmières d’exercer des missions et des compétences poussées, jusque-là dévolues aux médecins ; la création d’une pratique avancée en gérontologie permettrait de reconnaitre davantage l’expertise des infirmières et de mieux couvrir les besoins de prise en charge des personnes âgées.
Axe 5 : Garantir la mobilisation et la coordination des acteurs et des financements au niveau national et dans les territoires
- Créer une plateforme départementale des métiers du grand âge chargée de mettre en œuvre un guichet unique de sécurisation des recrutements
Explications : Ces plateformes départementales auraient pour mission d’organiser la mobilisation et la coordination, au niveau local, autour des formations aux métiers du grand âge, afin de susciter des vocations et de permettre aux candidats de réussir leur parcours de formation et leur insertion professionnelle.
- Assurer la mobilisation des financements nationaux nécessaires à la mise en place des actions
Explications : Le financement de ce plan relève de différents acteurs ; leur coordination sera assurée par le comité national des métiers du grand âge à mettre en place.